Le statut des gérants non-salariés a été créé par un décret-loi du 3 juillet 1944 signé par Pierre LAVAL qui est resté en vigueur, ayant modifié une loi fondatrice de VICHY du 21 mars 1941, portant création d’un statut dérogatoire pour les gérants non salariés de maisons d’alimentation à succursales multiples.
Il est actuellement codifié aux articles L 7322-1 et suivants du code du travail.
La société NICOLAS recours à ce statut pour l’exploitation de son réseau de succursales.
Ces gérants sont rémunérés par une commission sur les ventes et bénéficient de nombreux avantages du salariat comme le droit aux congés payés, aux assurances maladie et chômage.
Un gérant nous a saisi pour contester son licenciement après une inaptitude au poste déclarée par la médecine du travail pour motif professionnel, dès lors que la société n’avait pas procédé à une recherche de reclassement.
L’article L 1226-10 du code du travail impose en effet à l’employeur, avant tout licenciement dans le cadre d’une inaptitude au poste de travail, de rechercher par tous moyens à reclasser le salarié.
Seul un licenciement pour impossibilité de reclassement serait possible si le salarié refuse toutes les propositions.
La société NICOLAS considérait que cette obligation propre aux salariés ne s’appliquait pas aux gérants non salariés, et n’avait pas procédé à une recherche de reclassement.
Notre cabinet pensait au contraire que l’obligation de reclassement était applicable aux gérants non salariés.
Le conseil des prud’hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT nous a donné raison, et a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse en condamnant la société à payer au gérant 48 715 € à titre de dommages et intérêts, outre diverses sommes.
La société NICOLAS a interjeté appel de ce jugement, en continuant de soutenir que cette obligation de reclassement ne s’appliquait pas aux gérants non salariés, et qu’elle n’avait pas à rechercher un reclassement ;
La COUR D’APPEL de VERSAILLES vient de rendre l’arrêt ci-joint, qui nous donne entière satisfaction :
Elle confirme l’applicabilité aux gérants non salariés de l’obligation de reclassement prévue pour les salariés en cas d’inaptitude d’origine professionnelle (la solution resterait identique si l’inaptitude n’était pas d’origine professionnelle).
Elle augmente le montant des dommages et intérêts accordés au gérant à la somme que nous demandions de 60 000 €, outre diverses sommes accessoires.
Il s’agit donc d’une décision importante qui vient consolider les droits que les gérants non salariés sont fondés à revendiquer du salariat, notamment sur la question de l’inaptitude au travail, et du droit d’obtenir dans ce cas un reclassement à tout autre poste compatible.
JEAN-CHRISTOPHE BONFILS
AVOCAT Dijon
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